*La mise en apesanteur divine de “Saint François d’Assise”, SDF de la foi*
LE MONDE | 08.10.04 | 15h02
A l’Opéra Bastille, les tableaux franciscains d’Olivier Messiaen par Stanislas Nordey.
Avec cette nouvelle production du Saint-François d’Assise de Messiaen – la troisième depuis la création de l’œuvre en 1983 à Garnier puis celle de Peter Sellars à Bastille en 1993 -, l’Opéra de Paris recevait les premiers stigmates de l’ère Mortier (nouveau directeur, Le Monde du 17 juillet).
Rien à voir avec l’imagerie tatillonne et pseudo-réaliste de Messiaen imposant sa vision scénique lors de la création, puis avec le festival ludique et colorée de la volière vidéo de Sellars : le dépouillé de la mise en scène de Stanislas Nordey confine au dénuement. Dans un monde sans repères de temps ni d’espace, une plate-forme surélevée dans un haut hémicycle d’acier (une décharge ?) au milieu de nulle part, François va vivre le lent exil de son accession à la divinité, peu à peu roidi dans une froide incandescence. SDF de la foi, en T-shirt, pull zippé, veste trois-quarts marron et bonnet façon Emmaüs, il va franchir un à un les paliers de la mise en apesanteur divine.
D’une rigueur extreme au premier acte, au point que l’orchestre en paraît presque indécent de couleur et de sensualité, cette austérité devient enchantement dès le tableau de “l’Ange voyageur”. Petit prince funambule en imperméable blanc, les ailes soigneusement rangées dans une valise en Plexiglas, l’Ange pose par deux fois avec une grâce dansante et frondeuse la question de la prédestination, avant que d’apparaître à François.
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